29.3.05

Accroches Alizéennes

Il existe un journal bien sympa aux Antilles.

Son nom est France-Antilles.
Il relate sur un ton plutôt folklorique les diverses aventures et épopées qui se sont déroulées le jour précédent.

Le principe classique d'un journal, donc, me direz-vous.

Mais sa principale spécificité réside dans la force de ses accroches de titres, fleurant bon le Détective de la grande époque, mâtiné d'une pincée de France Soir, période redressage des ventes à tout prix.

"Pas de quartier pour les rouges" !!!!!
"Il l'abat sans pitié" !!!!
"La mort était au rendez vous" !!&%*$?!

Les titres sont présentés de sorte qu'on ne peut que saliver à la future lecture de ces malheurs titrés en petites affichettes fluorescentes subtilement placardées sur le moindre espace n'ayant pas encore été sacrifié au monde marchand producteur de richesses.

Donc, le matin, sachant que vous êtes réveillé depuis deux heures pétantes puisque le décalage horaire n'a pas de prise sur la pelote de nerfs que vous êtes, et après avoir récuré 5 fois la salle de bain à la brosse à ongles de votre hôte, c'est avec une rage avide que vous vous jetez sur ce saint quotidien, regorgeant des faits divers savoureux et de rumeurs juteuses.

Hélas, deux fois hélas et pas plus, car je viens de faire ma déclaration au tiers, et il ne me reste plus grand chose.
Hélas, disais-je donc, quelle déception une fois les 1 euros 20 acquités et le journal entre vos mains ! Que de mensonges !

"Au dernier tournoi de belotte de l'amicale des syndicalistes vindicatifs, Victorin Makossé possèdait un jeu quasi parfait. Dans le dernier tour, arrivé au dix de der, il sort le valet de coeur et l'abat sans pitié."
"Pas de pitié pour les rouges ! Tel pourrait être la conclusion que l'on pourrait tirer de la rencontre sportive entre Petit-Village et Terre-de-bas, notamment grâce à un splendide tir parfaitement cadré, à la 23ème minute de jeu."
"Félicien LaMort était au rendez vous, ce vendredi soir, dans le cadre du printemps des poètes identitaires. Il nous a régalé d'un florilège de nouvelles compositions, dont le très remarqué "On vous pendra jusqu'au dernier, salauds de blancs" "

Déception, déception.

Cette petite introduction pour vous apprendre que mon week-end pascal a été à peu près à la hauteur des titres de France-Antilles.
Sur le papier, on était parti, une fois de plus, pour danser en slip avec un abat-jour sur la tête.
Au concret, j'ai passé la plupart de mon temps engoncé dans des canapés approximatifs affublé d'un sourire figé pour m'empêcher de hurler à la mort mon désespoir grandissant.

Les gens sont des sacrés menteurs.

Hystériques, au sortir de la torpeur de l'hiver, ils vous vendent des bamboches à tout casser, avec des danseuses lascives enduites d'huiles parfumées, des motards dévalant les escaliers à cheval sur des engins graisseux avec l'orchestre brandebourgeois en tournée dans la cave à vin, et on se retrouve à discuter des avantages comparés entre les frais fixes et les frais réels une fois déduits les tickets de restaurant.

"Il égaye la soirée en lui faisant avaler son bulletin de naissance" !

En gros, mes dernières 48 heures se résument d'un gros avec une coupe de playmobil qui m'a répété 7 fois qu'il était peut être gay, d'une coiffeuse qui m'a patiemment expliqué la différence entre deux marques de tondeuse à cheveux, dont une qui marche apparement moins bien que l'autre, de félicitations collectives trop appuyées pour être sincères uniquement parceque j'avais acheté du mascarpone, un scoop pourri se faisandant d'heure en heure et j'en omets charitablement. Notamment la rediffusion d'A la recherche de la Nouvelle Star dans un semi-coma.

Par exemple, se retrouver, là, 13 à table, avec le premier cercle intime, celui qui théoriquement ne peut décevoir, histoire de fêter l'arrivée de ce têtard rougeaud aux couilles démesurées, sur le papier, c'était quelque chose de dévastateur.
Des grandes claques dans le dos, des cigares barreau de chaise, du vieux cognac et des anectodes savoureuses de nos glorieuses années.
Au final, des histoires de mal de dos, de manque d'argent, d'opérations chirurgicales à base de trépanation, de morts et de Turquie à la frontière de l'Europe.
Il faut se résoudre à admettre que nos dimanches sont désormais à l'image de ceux de nos parents. C'est dur.

Mais qu'importe, s'il ne doit en rester qu'un, je serai celui-là.
Qu'importe mes frères, que vous ayez sacrifié à cette sinistrose teintée de maturité déprimante et de rigueur gouvernementale.
Sachez que je porterai haut et fort l'étendard qui faisait jadis notre fierté.

Pour faire bonne figure, alors que la caméra haute fréquence, pointant sur bébé endormi, diffusait tout au long du repas sur la télé du salon son flux insipide de râles premier âge, je suis allé y montrer mes couilles tout en disant que j'étais Michaël Jackson.
Ca a eu un grand effet parmi les convives attablés. J'aurais collé du LSD dans ses couches qu'on ne m'aurait pas plus tancé pour mon manque de maturité déplorable.

Hope i die before i get old, je crois.

"Le sinistre pervers pris sur le vif, lors de son méprisable forfait." !

Un weekend pourri. Voilà tout.

Sinon, pas plus tard que tout à l'heure, histoire de mériter dignement la place qui échoit désormais à mon rang de rebelle aux cheveux dans le vent, j'ai dérapé sur le trottoir mouillé en sortant des mines de sel, pour lamentablement choir sur une barrière métallique.

Je crois bien que je me suis cassé la jambe. En tout cas, c'est noir et ca fait très mal.

Pour bien être certain que plus personne ne m'invite à ces maudits rendez vous, j'en ai profité pour forcer tant que je pouvais sur ce qui me restait de lambeau.

Théoriquement, je suis à présent paré.

Quand à ceux qui sous entendraient qu'il ne suffit pas de se casser la jambe pour ne plus écrire comme un pied, je les attends.



3 Comments:

Oh, c'est donc vrai pour la cascade. Hé bien je peux moi-même te donner un scoop sans intérêt : je prépare au moment où j'écris ces lignes une "cascade particulièrement douloureuse" dont je ressortirai certainement... bizarre. Plus de détails dans notre prochain flash.

By Anonymous Anonyme, at 2:39 PM  

"You can use HTML ..."
Ca change tout le temps pour déposer les comments !
Je peux te signer ton platre ?

By Anonymous Anonyme, at 9:51 PM  

Ne reculant devant aucun des sacrifices, j'ai profité de ce weekend pour me déplacer une vertèbre en toussant.
Ca rajoutera un peu de profondeur à mon avatar.
Toujours donner de sa personne.

By Blogger Découper selon les traits, at 10:34 AM  

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