13.4.06

Parlez en à votre médecin

Ca pourrait commencer comme une de ces comédies musicales enjouées, où même le pompiste fait hello de la main, en secouant la tête.
Le putain de soleil qui sourit.
Gosse je dessinais comme un pied, le genre maison carrée avec cheminée qui fume en été.
Le seul truc que je réussissais, c'était le soleil souriant.
Ca me prenait un temps fou, je tirais la langue, très appliqué.
Une fois, à l'école pour me remettre du dessin que je venais d'accomplir j'ai demandé un whisky. J'avais 4 ans. De dépit devant le refus des dominants, j'ai fini par montrer mon zizi.
On ne peut pas vraiment parler de bite, à 4 ans.
La psychologue avait parlé de pulsion primale et on en rit encore benoitement aux réunions de famille.

Le rythme à 4 temps qui fait sauter a pieds joints dans la flaque juste devant soi.
Le clodo sur son carton, qui lève la bouteille de jaja bien haut, parcequ'on est vraiment phé-no-mé-na-lalalala (ad-lib).
Les doigts d'honneur aux automobilistes qui s'esclaffent.
Finir par un grand coup de latte pour faire tomber les grasses poubelles.
Si tu aimes ton prochain, tape des mains.
De préférence avec un objet qui fait saigner méchant.

"Bonjour, on ne se connait pas, mais nous faisons ce chemin ensemble depuis je ne sais trop ô combien de temps. Il se trouve que c'est notre dernière fois. Et c'est important les dernières fois. Vous le savez n'est ce pas ? Sans dernière fois, a quoi bon tout le reste ? Si vous le savez alors je suis rassuré. Je peux partir serein."

On était dans une de ces baraques typiques, sur un bout de rocher corse.
Loin de tout, histoire de voir ce qu'on pouvait sauver, au delà des apparences.
Toujours les même obsessions. La fenêtre sur l'apic. Le contrebas dechaîné, fracassé par les flots. Les souffrances de cette gonzesse de Werther.
On se faisait un peu chier à vrai dire, parce qu'il n'y avait plus rien à dire depuis un bon moment. Et puis aussi parce qu'il faut se les farcir les soirées dans les coins paumés en Corse.
J'en étais à ma deuxième bouteille et elle avait les yeux rougis.
On attendait juste en silence le coroner, qu'il puisse enfin déclarer la mort officielle de ce froid bout de viande.
J'avais un de ces téléphones de yuppies, payé à prix d'or pour prendre des photos sous les jupes des filles, histoire de rigoler à la machine à café, entre deux séminaires.
Accessoirement, Il jouait Aline en mélodie à 4 pistes, beaucoup trop lentement.
Lorsque les premières notes ont coulé, nous nous sommes mis à danser, là tous les deux, dans cette cuisine qui sentait le vieux propre, sur des tomettes fêlées, sans dire un mot.
On peut pas vraiment dire que c'était du sentiment, tel qu'on le débite à la tranche au rayon romance du Champion du coin, mais c'était ce qu'il nous semblait devoir faire en de telles circonstances.
Quelques pas de danse sur un air mièvre, à moitié bouffés par la nuit et les moustiques. Officialiser. Labelliser. Catégoriser.
Notre dernière fois.
Le morceau s'est terminé, elle a recommencé à pleurer et j'ai fini la bouteille directement au boulot.
On ne s'echappe pas si facilement de ses propres clichés.

C'est marrant que je pense à ça.
Enfin, que j'y pense précisement maintenant, une coupe tiède à la main, pendant l'éloge mou qui m'est fait pour tous ces si bons et loyaux services rendus au capitalisme moderne, fleurant bon le Vous allez nous manquer et le Bon courage pour la suite.

Juste le bon moment pour sortir sa bite peut-être ?

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