17.1.05

Dans l'espace profond, personne ne vous entendra hurler


Lasciate ogni speranza

Il y avait quelque chose d'improbable à ce samedi.

Se retrouver comme ça, sans précaution particulière, au beau milieu d'une foule furieuse en plein déballage des soldes, rien ne m'y aurait préparé. Et pourtant, à la fête de la bière, je ne suis pas le dernier.

J'étais parti, candide, acheter une modeste paire de solides souliers en vue d'accomplir ma rude tâche d'ouvrier servile et ainsi obtenir à la fin de l'an les félicitations du contremaitre sévère mais juste, tout en tenant entre mes mains maladroites mon couvre chef sali par les poussières radioactives.

Au final, je me suis retrouvé propulsé en ultime tenant de la civilisation moderne, à lutter contre des hordes de succubes ayant massivement franchi le dernier portail.

Je n'ai pas d'avis particulier sur les soldes, je suis même pour, je crois.
J'ai un splendide costume de velours mauve tendance Austin Powers pour en témoigner.
Mais, dans mes souvenirs, les soldes se situent dans des magasins de marques qui consentent sous la menace à finalement lâcher de minables rabais sur des articles maintes fois détrempés par l'écume perlant des babines des Amis du Peuple lourdement aveuglés par la propagande de masse.

Alors que non.

Les soldes survivent à la Zone Industrielle.

Ayant accepté, indéniablement par faiblesse et sur la promesse de paradisiaques surprises dont je me questionne encore quant à la pertinence avérée, de me rendre dans ces algecos débités au kilomètre et rappellant furieusement les villes fantômes du far wast version décors de plateaux de cinémas, je me retrouvais de facto en ce samedi matin sur un parking humide, la vapeur aux lèvres, rejoignant la cohorte des ombres déjà nombreuses en ces heures improbables.

Une étuve infernale qui se plaque au visage à l'ouverture des portes. Des torrents de chair qui se déversent avidemment sur la moindre pièce de tissus siglée. Des harpies fondant en nuées sur des éclats de verroterie félée. CHIENS ET CHATS COUCHANT ENSEMBLE. LES MORTS SE LEVANT DE LEURS TOMBES. Rien ne peut préparer à ça. Il faut avoir en tête ces deux secondes de ralenti où l'héroique pompier ouvre cette porte piégée dans Backdraft pour réellement prendre la mesure d'un tel tableau.

Ici parlent l'instinct de survie et la force brutale disproportionnée. Ici les dieux réclament du sang de vierge et des viscères fraiches. Ici est fait matière de l'Enfer sur Terre.

Vous qui entrez ici, abandonnez tout espoir.

Alors, terrassé par un combat dont je ne pouvais être que perdant d'avance, j'ai repoussé la lourde porte massive, échine courbée, soufflant centimètre après centimètre gagné contre le Malin. Puis j'ai patiemment scellé les neuf sceaux qui n'auraient jamais du être brisés. La malédiction était contenue, pour combien de temps alors ?

Dans le cul, la halle aux chaussures !

Je peux vous dire que j'ai fait sensation ce matin, avec mes sandalettes de plage en plastique.




2 Comments:

les soldes, nouvel opium du peuple!

By Blogger smithee, at 6:04 PM  

FP : tu sais bien que voir toutes ces femmes essayer des bottes montantes, ca me rend tout chose.

Alan : J'en étais resté à la télévision, en fait. Ils devraient prevenir, je trouve. Ce genre de choses, ça ne se fait pas.

Raf : Merci pour le compliment. Pour être tout à fait franc, je ne suis pas allé travailer en sandalettes ce matin, c'était une grossière ficelle scénaristique.
Le dress-code est assez strict et j'y suis allé chaussé comme d'habitude, avec une paire de talons hauts Gucci.

By Blogger Découper selon les traits, at 11:14 PM  

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